mercredi 27 mars 2019

Chronique : Spire T1 Ce qui relie


Laurent Genefort
Auteur français (voir le site Internet)
Critic
Science-Fiction
18 €
309 pages

J'ai découvert Laurent Genefort grâce au podcast Procrastination qu'il co-anime avec Lionel Davoust et Mélani Fazi. Je connaissais déjà ces deux derniers (j'ai quasiment toute la biblio de Lionel !) mais je n'avais pas eu encore l'occasion de lire un roman de Laurent Genefort. Or j'ai trouvé ses interventions dans ces podcasts très intéressantes, cela m'a donné envie de voir comment justement lui aussi développait ses univers. En plus, je délaisse trop la SF ces dernières années, donc ni une ni deux, je me suis jetée sur lui aux Imaginales de 2018 et je lui ai pris deux romans, dont le premier tome de la trilogie Spire qui m'attirait depuis un moment avec les trois magnifiques couvertures formant une seule et même image.

Après cette longue introduction, rentrons dans le vif du sujet. J'ai passé un très bon moment de lecture avec Spire, dépaysant, instructif, immersif et en compagnie de personnages intelligents et attachants. L'idée de nos héros, Lenoor et Hummel, est louable, à savoir créer leur propre compagnie de transport interstellaire qui desservirait des planètes éloignées, délaissées et aux conditions d'accueil des vaisseaux plutôt hasardeuses. Seulement, les voyages dans l'espace sont dangereux... et surtout les atterrissages !

Le parti pris de l'auteur est de s'attarder sur le contexte de création de la Spire, puis de faire des ellipses temporelles pour nous amener à des moments clés. J'ai apprécié ces zooms narratifs qu'il nous présente, qui vont nous permettre d'apprendre à connaître nos principaux héros en premier lieu, puis les nouveaux venus, ainsi que les valeurs portées par toutes ces personnes, hommes ou femmes. 

La création de la Spire s'accompagne malheureusement de complots et de coups bas pour essayer de réduire à néant cette nouvelle compagnie. À cela s'ajoutent les conditions difficiles d'accès à chaque planète. J'ai trouvé original que pour une fois ce ne soit pas l'espace en lui-même qui soit source de danger mais bien les manœuvres sur les planètes. De la même manière, pas d'alien sanguinaire mais des colons aux objectifs différents sur chaque monde, au niveau de développement inégal et qui rencontrent des problèmes sociétaux liés à toute colonisation ainsi qu'à l'isolement.

J'ai beaucoup aimé suivre des personnages qui, pour une fois, sont quasiment tous foncièrement gentils et altruistes. Certes, la compagnie est lucrative, ce qui est normal pour payer les vaisseaux et les employés, mais sa création part d'un bon sentiment et il est facile de s'identifier à tous ces personnages.  J'ai donc aussi apprécié le développement progressif de la compagnie mais qui sous-entend malheureusement de futurs problèmes dans les prochains tomes. Qui dit agrandissement de la compagnie dit plus d'argent à brasser, ce qui rime presque irrémédiablement avec des dissidences internes, sans parler d'un des personnages importants qui se rapproche davantage du financier et qui donc n'a pas forcément toujours la même vision que nos pilotes. Bref, ça sent le roussi pour la suite !

J'ai commencé par un des derniers cycles de l'auteur, donc je découvre sa mythologie autour des portes de Vangkt, des sortes de portes des étoiles si je devais faire la comparaison. Et du coup, j'étais frustrée de ne pas en savoir davantage sur ce sujet qui me semble passionnant. Il ne tient donc qu'à moi de rattraper mon retard sur la bibliographie de l'auteur.

Je suis donc ravie de ma découverte, j'ai aimé la sobriété narrative de l'auteur (il n'essaye pas d'en faire trop, d'être trop technique ou au contraire trop bref ou incisif), ses idées, sa vision, ses personnages et les valeurs qu'ils véhiculent. Je prendrai la suite à coup sûr et je dois me pencher sur son autre cycle Omale
 Ma note :

mardi 12 mars 2019

Chronique : Le Dieu-Oiseau




Aurélie Wellenstein
Autrice française
Scrinéo
Fantasy
16,90 €
333 pages

J'avais lu et globalement apprécié les précédents romans de l'autrice, Le Roi des Fauves et Les Loups Chantants, même s'il y avait toujours un petit manque d'approfondissement à mes yeux, notamment sur la fin des Loups Chantants. Il n'en demeurait pas moins que les intrigues étaient intéressantes et surtout très prenantes. L'ambiance, la violence, les profonds sentiments d'injustice sont les points forts de l'autrice dans tous ses récits et le Dieu-Oiseau n'y échappe pas. 

L'ambiance générale du roman est sombre et glauque. Le postulat du pays où vit Faolan est que tous les dix ans a lieu une épreuve terrible, sorte de Battle Royal. A l'issue de la quête de l’œuf d'or sur l'île des dieux, le vainqueur règnera sur les autres clans et réduira tous les autres en esclavages, et s'il peut bouffer les vaincus, tout n'est que mieux. J'ai déjà eu du mal avec ce concept ultra violent (cela ne me dérange pas en soi) mais que je trouve bancal. Dévorer le cœur de l'ennemi est une coutume qui a été découverte chez certains peuples et la croyance qui fait qu'on s'approprie les pouvoirs ou l'âme de la personne peut se comprendre. Mais le reste, la mise en esclavage des anciens vainqueurs et l'oppression générale de tout le monde sur une terre qui m'a donné une impression de désolée, je trouve ça contreproductif et je vois mal comment ils ont pu survivre aussi longtemps. Et surtout, devoir remettre le titre en jeu avec un mélange d'anciens esclaves et de maîtres, je ne vois pas du tout ce principe durer. Les forts auraient dû vouloir garder leur titre depuis un bail. Tout ceci me paraissait donc "trop", il n'y avait pas forcément besoin d'autant pour justifier tout ce qui a été mis en branle ni la quête de Faolan, car au final je n'ai pas réussi à m'identifier à ces peuples.

Notre héros, Faolan, est réduit en esclavage, et a vu sa famille être massacrée et dévorée par ceux qui le briment actuellement, dont son maître Torok. Et donc Faolan va vouloir participer à cette course (tout le monde peut y prétendre). On nous dit que la vengeance pousse Faolan à participer mais des fois je me demandais si Faolan lui-même savait ce qu'il voulait vraiment. Ses convictions ne m'ont pas forcément convaincue du coup je le voyais mal tenir ces épreuves, déjà qu'on nous dit bien qu'il n'a aucune condition physique, rien que la première épreuve, il aurait dû mourir noyé. Il y a un décalage entre ce que l'on nous dit, l'épreuve décrite, l'état physique (car après il se blesse) et ce qu'il parvient à accomplir. Ce n'est pas très crédible à mes yeux. Je suis restée assez extérieure à notre héros, ayant plus d'empathie pour certains de ses concurrents.

Les points positifs sont quand même une excellente immersion dans l'ambiance sombre, dans les épreuves, dans cette lutte incessante et tous les pièges que recèle l'île où Faolan et ses concurrents vont se retrouver. La psychologie de Faolan et sa relation avec Torok aussi est très intéressante, même si elle vient trop tard à mon goût, sur la fin c'est beaucoup mieux traité et ça monte en puissance mais j'aurais aimé avoir ces cartes-là en main bien avant histoire de rendre Faolan plus crédible dès le départ. Cela aurait permis davantage d'empathie face à la crédulité du personnage. J'ai vraiment tourné les pages avec intérêt pour savoir justement ce qui se cachait derrière cette quête, derrière ces anciens champions, derrière les visions de Faolan et quel serait son choix final. Malheureusement,  la fin m'a déçu. Il y avait encore une fois un tel potentiel d'idées à explorer sur le psychisme, les cercles vicieux, l'espoir... or, encore une fois pour moi ce n'est pas assez approfondi. Il y avait plusieurs fins possibles et l'autrice aurait pu sans aucun problème en choisir une autre sans pour autant perdre son public à mon humble avis.

Du coup je ressors encore une fois mitigée car la lecture est très prenante, l'ambiance est très travaillée et sombre, violente et malgré les défauts que j'ai pu trouvé j'ai plutôt apprécié ma lecture, mais la fin encore une fois n'est pas assez aboutie pour moi. Après tout ce qui est déployé, je trouve que ça retombe comme un soufflé. On vend ce livre comme le plus gore et violent de l'autrice mais j'ai envie de dire "et pour quoi faire ?" Je recherche encore le but, le message, au-delà de Faolan qui cherche à s'émanciper.


Pour autant le prochain roman de l'autrice sera dans ma PAL, ça traite d'élévation du niveau de la mer et d'impact écologique donc en gros c'est mon métier donc je serai au rendez-vous en espérant qu'il n'y aura pas ces mêmes défauts.

Ma note : :star::star::star::star-empty::star-empty:

mercredi 6 mars 2019

Chronique : les aventuriers de la mer T8 & T9

 

Robin HOBB
Traduction : Véronique David-Marescot
J'ai Lu
Fantasy
7,70€
377-378 pages


J'ai cette fois-ci enchaîné les deux derniers tomes, car il m'a été impossible de ne pas vouloir connaître le fin mot de l'histoire sur-le-champ. Tout ce qui a été mis en place dans les tomes précédents voit enfin son aboutissement. La tension est palpable pour Althea et sa quête pour récupérer la Vivacia, sauf que nous savons, nous, que son navire n'est plus le même, on se doute que les retrouvailles seront donc tendues. La pauvre Althea va vivre de durs moments particulièrement injustes mais j'ai aimé la fin que Robin Hobb lui a réservé. Elle aura été mon personnage préféré du début à la fin ! Je mets aussi Brashen dans le même panier, lui aussi a été un de mes chouchous et j'ai apprécié son évolution ainsi que son caractère. La fin qui lui est réservée m'a également comblée et je trouve qu'on peut tous être fiers de lui ainsi que de Parangon qui lui aussi a fait beaucoup de travail sur lui-même dans ces derniers tomes.

Selden a endossé un rôle assez particulier qui lui a permis de sortir du lot, de ne pas juste incarner le petit dernier trimballé d'un point A à un point B. J'imagine qu'il aura de l'importance dans le futur. Rheyn prend aussi du grade et une importance capitale pour la suite. C'est un personnage qui est sympathique à suivre et sa relation avec Tintaglia le dragon est plaisante à lire, néanmoins face aux autres personnages charismatiques, il fait plus effacé. Tintaglia est vraiment impressionnante, on perçoit bien sa grandeur, sa force et on se sent ridiculement petit à côté d'elle. Un Dragon dans toute sa splendeur !

Malta quant à elle s'est entièrement révélée. Tous ses caprices et son caractère de fille pourrie-gâtée a enfin trouvé une utilité et elle s'en sort comme une reine. Je crois que c'est le personnage dont l'évolution a été la plus spectaculaire, mais aussi la plus longue. Elle a incroyablement muri et c'était très plaisant à suivre. Ronica s'est peu à peu effacée pour permettre à Keffria de prendre enfin ses responsabilités.  Je n'ai jamais trop adhéré à Keffria mais au moins, elle n'a pas baissé les bras et va pouvoir s'épanouir dans ces nouvelles conditions (du moins on le lui souhaite). La situation globale à Terrilville a également été chamboulée, plus rien ne sera jamais comme avant maintenant que les Dragons sont là. On sent que tout ceci ne sont que des prémices qui s'inscrivent dans un plus grand cycle (l'assassin royal, la cité des anciens...) mais c'était très intéressant  à suivre. 

Pour terminer le tour des évolutions, Hiémain est le seul qui m'a déçue. Lui qui était si prometteur, je trouve qu'il a perdu ses capacités de réflexion, de remise en question et d'humilité, aveuglé par son admiration pour Kennit. Je serai curieuse de savoir s'il a sa place dans le reste de l'univers de Robin Hobb, mais sa fin est la seule qui ne plaît pas. Etta a aussi une sacré évolution depuis le premier tome, son amour pour Kennit est là aussi trop aveugle même si elle a davantage de jugeote que Hiémain. C'est encore un sacré personnage féminin, fort et indépendant qui s'est battu pour évoluer. 

Quant à Kennit, j'ai rarement suivi un personnage qui m'a à la fois fascinée et révoltée de cette manière. Il est très impressionnant et voir tout le monde tomber dans le panneau de sa toute puissance est aussi frustrant qu'amusant. Nous avons beaucoup de révélations inattendues (en tout cas pour moi) sur son passé, son identité et ses failles émotionnelles. C'est un personnage très complexe et vraiment intéressant à suivre, malgré ses fautes (même s'il ne faut pas pousser, il est allé trop loin pour être pardonné). 

Ainsi, à part Hiémain, toutes les fins pour l'ensemble des personnages (humains, dragons, vivenef) m'ont satisfait. La fin est belle, encourageante et bien pensée. L'autrice prend bien le temps de boucler toutes ses intrigues et de soigner sa transition vers la suite du récit. On comprend que d'autres aventures les attendent et on a envie d'embarquer à nouveau avec eux. J'ai été très contente de découvrir cette histoire si connue, elle a été très inspirante, dépaysante et instructive. Impossible donc de ne pas vous conseiller cette saga entière.



Ma note : :star::star::star::star::star: